Les faces cachées de l'EXPATRIATION
- Par carole17
- Le 18/12/2017
- Dans Mieux comprendre la RD
Expatriation : « Quitter sa patrie pour aller vivre dans un autre pays ». Assez simple comme définition vous en conviendrez, alors que vous et moi savons très bien que c’est parfois loin de l’être. Qu’elle soit choisie et mûrement réfléchie, qu’elle soit pour saisir une opportunité de travail, dans l’espoir d’un changement de vie, ou pour fuir une situation délicate, l’expatriation est dans tous les cas un défi émotionnel que tout le monde n’arrivera malheureusement pas à relever.
Voici selon moi les 5 choses dont nous devons être conscients avant de s’expatrier :
LE SENTIMENT DE FAIRE PARTIE D’UNE MINORITÉ subsiste même après de nombreuses années, que nous soyons intégrés ou pas. Alors que parfois le pays qui nous accueil propose des tas de structures adaptées à notre culture d’origine (écoles spécialisées, restaurants, lieux de cultes, parfois un quartier entier dédié à notre communauté), au quotidien, il nous arrive de nous sentir victime d’injustice, de penser être traité différemment. Notre paranoïa l’attribue au fait que nous ne sommes pas originaires du pays. Pourtant si nous prenions la peine de voir plus loin que le bout de notre nez, nous verrions que des tas de natifs (dominicains par exemple) vivent les mêmes choses : contrôles routier abusifs, prix de marchandises gonflés, argent prêté jamais rendu…etc)
Autre point de vue : dans notre pays d’origine nous subissons aussi des injustices régulièrement (la MSA qui nous réclame une année complète de charges sociales alors que nous sommes radié depuis le mois de mars, la demande de visa touristique de notre fils refusée car la France n’a pas la garanti que « l’enfant retournera dans son pays », arnaques en tout genre…). Mais bizarrement dans ce cas, nous n’attribuons pas ces injustices à notre nationalité. Je pense donc que c’est le fait d’être en minorité dans un pays qui accentue ce sentiment. Bon il faut dire que les petits surnoms qu’on nous donne n’arrangent pas vraiment les choses. Dans mon cas : 9 ans à St Martin « Hey white girl ! », 10 ans en Rep dom « Hola gringa !», 4 ans en France : « Ho la dominicaine il faut te réadapter un peu !! »
L’ACCEPTATION DE LA NOUVELLE CULTURE et l’apprentissage de la langue sont des choses parfois difficiles pour beaucoup d'entre nous. Il est possible de garder ses valeurs et un certain équilibre tout en acceptant cette nouvelle réalité mais, celui qui ne voudra pas comprendre et s’approprier ces nouvelles problématiques du quotidien deviendra alors un expatrié frustré et frustrant ; celui qui ne notera que les choses qui vont mal et descendra la réputation de son pays d’accueil juste parce qu’il n’a pas su adapter sa vision… Un pays n’a pas à changer ses siècles de culture pour faire plaisir à un nouveau venu. Attention je ne parle pas ici des problèmes graves de certains pays tels que le manquement aux droits humains ou le non-respect de la liberté etc…bien sûr nous voudrions que ces choses changent et elles le feront ! Un pays qui verra fuir des milliers de compatriotes en quête de meilleures conditions de vies, se retrouvera sans ressources humaines et finira bien par se remettre en question… (heee oui, je suis une éternelle optimiste, certains diront naïve !)
AVOIR DES RESSOURCES MORALES HORS NORMES pour faire face aux moments de solitude et au manque de la famille, des amis, des repères. La différence de culture fait que nous ne nous sentons pas toujours compris ou nous ne comprenons pas certains gestes ou remarques de nos hôtes. C’est d’ailleurs pour cela que les communautés aiment à se regrouper dans une même ville ou quartier, pour chercher le réconfort, la compréhension de ses pairs, le sentiment d’appartenance à un groupe. Malheureusement nous le savons, ce regroupement accentue et favorise parfois la non-intégration. Pour réussir son expatriation il est primordial de bien connaitre ses priorités, de toujours se rappeler pourquoi nous avons fait le choix de quitter notre pays. Notre force mentale devient notre meilleur allié.
AVOIR DES RESSOURCES FINANCIÈRES PLUTOT ÉLEVÉES pour pouvoir se permettre de rentrer de temps en temps dans son pays d’origine pour se ressourcer ou encore pouvoir recevoir sa famille en vacances quand on le désire. C’est en périodes de fêtes que c’est le plus difficile, heureusement nos amis skype et facebook permettent de rester en contact avec les êtres chers, même si parfois cela ne suffit pas : des grands-parents qui ne voient pas grandir leurs petits enfants, des parents qui vieillissent et avec qui nous aimerions passer plus de temps, des enfants de couple séparés qui ne voient leur papa ou maman qu’une fois par an… Souvent la priorité étant de voir nos proches, tout notre argent passe dans ces voyages « obligatoires » si je puis dire et du coup nous nous privons d’autre chose. Nous devons donc nous assurer que nous serons financièrement à l’aise pour pallier à cela sinon, notre expatriation pourrait bien tourner au cauchemar.
Enfin, sans doute le plus difficile :
VOIR SA VIE DE COUPLE OU DE FAMILLE SE FRAGILISER au fil des mois. En effet nous ne sommes pas tous égaux face à l’adaptation, les changements qui s’opèrent en nous peuvent être différents. Il est malheureusement courant de voir des couples qui ne se comprennent plus, un enfant malheureux dans sa nouvelle vie alors que ses frères et sœurs vont bien. Des sentiments de culpabilité peuvent apparaitre chez certains d'entre nous. Il est donc primordial dans ces cas de bien se connaitre, de beaucoup communiquer, de s’entraider et de faire de gros efforts pour que la famille reste unie. Mais parfois l’inévitable arrive, des familles se déchirent, se séparent et prennent de nouveaux chemins.
Pour ceux qui me connaissent, vous savez que j’ai normalement peu de difficultés à toujours trouver le petit côté positif de chaque chose. Pourtant, pour ce sujet que j’ai décidé de m’approprié aujourd hui, je n’y arrive pas… Je dirais quand même, alors que je vis toutes ces faces cachées de l’expatriation régulièrement, que je SAIS qu’il y autant de manières de les vivre et d’y réagir que nous sommes d’expatriés dans le monde.
Carole Anita.
Crédit photos: le talentueux Martin Rodriquez